Retrouvé dans les affaires de mon père, ce cahier d’écolier, son cahier d’hébreu.
À plus de 70 ans, ces cours d’hébreu pris au centre communautaire de la rue Lafayette sonnaient comme une revanche sur la vie.
Mon père n’avait pas fait d’études, à 14 ans, certificat d’études en poche, il dut quitter l’école pour travailler dans l’atelier familial de confection.
Un atelier à la Grunberg, retrouvé aussi dans le Idiss de Robert Badinter.
Il en avait gardé une parfaite maîtrise du yiddish et du repassage.
Et l’immense frustration de n’être pas allé au lycée, de n’avoir pu étudier.
Aussi notre éducation a-t-elle tourné autour de ce leitmotiv : « Je n’aurai pas grand chose à vous léguer, alors faites des études, tant que vous voulez, tout ce que vous voulez, mais étudiez ! »
Mon père n’avait pas d’instruction religieuse non plus, il n’avait pas fait sa Bar Mitzvah. Personne ne l’y avait poussé. Et cela aussi il le regrettait.
En parcourant ces lignes et ces pages consciencieusement remplies, de graphèmes, de traduction, des devoirs à faire pour la semaine suivante, je mesure son courage, sa volonté et sa formidable soif d’apprendre.
Et en ce jour si particulier, j’aimerais lui dire ma fierté.
Bonne fête Papa, où que tu sois